Architecture à la Préhistoire : 1- L'habitat nomade du Paléolithique et au Mésolithique |
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Écrit par Danielle Chantegrel | |||
Dimanche, 25 Avril 2021 00:00 | |||
Architecture à la Préhistoire1- L'habitat nomade du Paléolithique et au Mésolithique
Pour autant, dès les premiers temps, des solutions d'habitation et d'organisation des espaces vont être inventer. Même modeste, rudimentaire ou précaire, l'existence d'une forme d'habitat est avérée dès le Paléolithique inférieur. Les dispositifs sont en relation étroite avec l'environnement naturel de leur implantation. Des Matériaux utilisés sont souvent complètement dégradables. Cependant quelques vestiges - pavages, murets, fosses… - prouvent que les premiers humains ont su s'adapter, s'approprier des techniques de constructions et organiser leur habitat en fonction de leur mode vie nomade. Dans ce premier chapitre sur l'architecture à la Préhistoire, nous regarderons plus précisément l'habitat précaire, l'habitat nomade durant les périodes du Paléolithique au Mésolithique : - Les vestiges et aménagements existants,- Modes de vie et habitats des premières lignées humaines. Les contextes de réalisations de ces constructions sont à regarder dans les articles concernant leurs différentes périodes respectives de réalisation : Paléolithique, Mésolithique.
Vestiges et aménagements existants
//// Les vestiges
Les vestiges sont inexistants ou peu nombreux au début de la toute première phase du Paléolithique. Néanmoins les archéologues repèrent, à la fin du Paléolithique archaïque, des informations importantes sur les espaces aménagés pour habiter. Les traces vont être encore plus abondantes dans les couches supérieures, à partir du Paléolithique supérieur. La qualité et la quantité de vestiges récupérés sur chaque site nous informent sur la durée des séjours : de brèves haltes, des bivouacs de quelques jours, à des installations de plus longue durée, sur des territoires plus ou moins étendus. Il est possible de différencier les aires de différentes activités selon la nature des vestiges in situ. Les passages et occupations peuvent être successifs, parfois sur plusieurs générations : ils se remarquent par une accumulation d'objets de périodes différentes dans un même site. Le travail des archéologues consiste à répertorier, analyser tous les paramètres pour confirmer la nature du site, le (les) espèce(s) concernée(s), la datation des vestiges…. Les restes d'habitats retrouvés ne présentent pas d'évolution technologique ou sociétale dans le temps sur ces deux premières périodes de la Préhistoire : un habitat plus récent peut être plus rudimentaire qu'un plus ancien. Seul des contextes différents expliquent les variations de formes, de matériaux utilisés, d'organisations spatiales repérées. Les provenances de matériaux sur les sites sont, avant tout, locales. Les distances sont de l'ordre de 5 km, toutefois elles sont parfois plus lointaines, 20 à 30 km. Deux possibilités sont envisagées par les préhistoriens : la nécessité un déplacement pour convoyer ces matériaux ou l'existence de réseaux d'échanges de matières premières.
Que reste-t-il ?On reconnaît un séjour plus ou moins prolongé d'un homme (ou d'un groupe d'homme) grâce à la présence d'un certain nombre de traces qu'il(s) a(ont) laissées. L'inventaire ci-dessous est non exhaustif, tous ces éléments ne se retrouvent pas sur un même site, il s'agit d'une énumération des possibles vestiges :
-- des dispositions de pierres noircies ou de petit muret, en cercle ou demi-cercle,
//// Les aménagementsLes paléontologues étudient les marques et les vestiges tangibles pour déterminer les organisations spatiales des différents lieux de vie des premiers hommes. Ils identifient les délimitations et aménagements des aires d'activités. Les aménagements des espaces sont plus ou moins existants et importants en fonction de la durée des séjours. On peut y trouver : des foyers, des murets, des dallages, des marques d'implantations de poteaux, des fosses….
Les séjours de groupes d'hommes sont plus ou moins prolongés ; les installations, plus ou moins complexes et importantes. Si l'homme s'installe en habitat naturel, il reste à proximité de l'ouverture des grottes, dans les endroits proches de la lumière du jour , sinon il s'établit des campements en plein-air. Les deux types de lieux sont occupés de façon précaire, provisoire ou sur le long terme selon le type de campement. Les archéologues recherchent le positionnement dans l'espace des divers objets retrouvés, des traces d'activités et des vestiges d'aménagements : Le répertoriage des vestiges et leur localisation dans l'espace nous donnent les premières indications sur l'habitat et sur le mode de vie des premiers hommes. Ces traces nous renseignent sur :
- "atelier" de fabrication d'armes ou d'outils (matériel lithique présent sur place : outils de taille des silex, foyer, éclats, nucleus… )- "atelier" de fabrication d'objets utilitaires (matériel lithique et osseux)- "atelier" de dépeçage (outils tranchants, perçoirs…)- "atelier" de traitement de peaux : tannage, séchage des peaux… (outils spécifiques - grattoirs… , pierres plates à enduire, fosses…)- "atelier" de confection d'habits ou d'objets en peaux (outils spécifiques : pointes de perçage des peaux, ; pierre , aiguilles en os…)- "atelier" de création de statuettes et de parures (matériel lithique et osseux : outils, débris et objets)- … Quels aménagements ? Et pour quoi faire ?Les informations sur les activités repérées grâce aux vestiges existants permettent de se représenter mentalement les lieux de vie de nos lointains ancêtres. Pour autant, l'inventaire des vestiges et leur localisation dans l'espace, ne suffit à comprendre la vie des premiers hommes. Percevoir que derrière les vestiges et les espaces qu'ils délimitent, il y a des usages et des habitudes, m'a semblé important. On trouvera ci-dessous, de façon non exhaustive, une mise en parallèle des différentes fonctions et des vestiges aménagements d'espaces retrouvés :
=== Cuire la nourriture :
=== Préparer et conserver la nourriture :![]() ![]()
=== S'habiller :
=== Habiter :
=== Fabriquer divers artefacts :
=== Jeter :
=== Honorer leurs morts :
Dans le même environnement, on trouve aussi la présence animale à proximité :
//// Que suppose-t-on ? Les éléments d'aménagements dégradables :
Les hypothèses sont variées :
//// Conclusion sur les vestiges et aménagements existants au Paléolithique et au Mésolithique :Les sites retrouvés montrent que les habitats des premiers humains ne sont pas seulement des refuges face aux intempéries mais des lieux de vie complexes, à usage domestique quotidien et autour d'activités spécifiques - taille silex, travail du bois, de l'os... , boucherie, peausserie, séchage des herbes, du bois vert… .
Des vestiges d'artefacts ornés ou sculptés ou peints montrent un approche de l'objet qui va au-delà du fonctionnelle. Les trois facettes - firmitas (solidité, ou robustesse) ; utilitas (commodité, ou utilité) ; venustas (beauté, ou volupté) - de la théorie de Vitruve pour l'architecture sur les qualités d'une structure semble fermement ancrées dans notre lointain passé. Les préhistoriens classent ces manifestations esthétiques, sous les intitulés d'art pariétal, d'art mobilier et d'art rupestre. L'ensemble des éléments recueillis montre la nécessité de l'homme à s'adapter et à établir une organisation sociale importante tant pour réaliser les activités que pour créer les lieux de vie. Pour cela il possèdera dès les premiers temps une bonne connaissance de son environnement et des ressources qu'il offre. À partir de l'ensemble des informations recueillies, des hypothèses multiples sont envisagées et reconstituées. L'interprétation des vestiges, sans cesse renouvelée par de nouvelles découvertes, restent ouvertes à de nouvelles suppositions.
Modes de vie et habitats des premières lignées humaines
L'homme se déplace en fonction de ses besoins. L'implantation d'un campement s'effectue pour des raisons stratégiques : Les choix de lieux de vie sont choisis en relation du contexte : montagne, plaine, steppe, étendue d'eau… , du climat et de la saison… à proximité des ressources naturelles à disposition :
L'habitat de l'homme préhistorique est un l'endroit de refuge pour manger, dormir, se reposer, se protéger des intempéries et de la faune hostile. C'est aussi, avant tout, un lieu de vie qui lui permet de se livrer à diverses activités : fabriquer tous les objets nécessaires à leur vie - outils, armes, objets utilitaires, parures, statuettes... - ; conditionner ses provisions : préparer, découper, sécher, fumer le gibier, nettoyer les peaux, stocker…. L'habitat prendra des formes aléatoires en fonction de cet environnement immédiat. Une grande créativité et adaptabilité ont été nécessaire pour construire ces lieux de vie.
//// L'habitat au Paléolithique archaïque [- 2 900 000 à - 650 000]
Les traces les plus anciennes de séjours sur un lieu datent de -2,4 Ma. Les sites se situent près de lacs du rift africain : dans la vallée du lac Turkana au Kenya, celles de l'Awash et de l'Omo en Éthiopie. Dans ces lieux, il a été repéré des ossements d'animaux tués (ou récupérés- le charognage, plutôt que la chasse, est plus que probable -), des déchets de nourriture et des restes de taille de choppers. Les bivouacs sont de brèves durées - quelques heures à quelques jours - et ne présentent aucune trace d'habitat. Il est admis par les préhistoriens qu'on ne peut parler de campement sur cette période. ![]() ![]() Ce n'est qu'à partir de -1,8 Ma environ, à l'Oldowayen, dans les gorges d'Olduvai en Tanzanie - site DK1 - que les fouilles révèlent des «fonds de cabane» (interprétées ainsi par Mary et Louis Leakey en 1993). Il s'agit d'une zone circulaire de 5 m de diamètre, délimitée de petits blocs de pierre empilés sur 30 cm de hauteur qui pourrait servir de support à des branchages ; à l'intérieur du cercle : des objets, des galets aménagés et des éclats, d'ossements d'animaux consommés. Les archéologues supposent que ce sont les premiers réels vestiges d'habitats retrouvés. Ils permettraient de se protéger des intempéries et des dangers. ![]() ![]() L'habitat KBS de Koobi Fora au Kenya, c'est 100 m2 d'occupation liée à la chasse qui ont été révélés. Le site est daté de -1,9 Ma. Les humains présents sur ce lieu sont cueilleurs-chasseurs : les animaux consommés ont été chassés, autour de ce site, puis ramenés au camp de base. Ce sont des hippopotames, des gazelles, des porcs épics. Le campement est structuré par un emplacement central d'où se répartissent, en périphérie, des lieux d'activités spécialisées - aires de taille, aires de boucherie... -, comme en témoigne les vestiges - ossements, outils (plus de 200 outils), nucléus, éclats -. Les outils retrouvés sur les sites de Koobi Fora sont datés de Oldowayen et Acheuléen. On peut donc supposer que les occupants de ces lieux avaient établi de véritables abris dans ce campement de base pour organiser leurs différentes activités. Ce nouveau comportement serait le fait de l'Homo ergaster ou l'Homo habilis.
Vers -1,4 Ma, les premiers indices d'utilisation du feu sont repérables sur certains sites. La domestication complète du feu n'est pour autant pas encore attestée à cette période. ![]() //// L'habitat au Paléolithique inférieur [- 650 000 à - 300 000]À cette période, les espèces Homos, sont cueilleurs-chasseurs. Ils s'installent en fonction de leurs besoins sur des territoires riches en ressources naturelles. Les lieux de séjour sont divers - en plein-air, en abris sous-roche, à l'entrée d'une grotte - selon ce que l'environnement peut leur proposer. Ils sont utilisés pour quelques heures, à quelques jours, jusqu'à quelques mois : Cela va de campements modestes, très éphémères à des choix de sites occupés de manière stable et sur de plus longue durée. Le choix du lieu est en relation directe avec les ressources recherchées, des activités envisagées, des goûts alimentaires…. Certains sites semblent très prisés car ils leur permettent de rayonner sur quelques kilomètres pour rechercher les matières premières abondantes - gibier, fruits, racines, graines, silex... - dans le secteur. Dans ce cas, ils sont occupés de nombreuses fois. Les sites retrouvés montrent qu'ils étaient spécialisés : lieu de vie quotidienne, site de boucherie, ateliers de taille... . Les aménagements sont sommaires mais structurés et parfois construits : dallage, alignements de blocs, murets, emplacements de litières ; des vestiges de calages de poteaux en plein-air ou en abri naturel - prouve l'existence de charpente pour des huttes ou des tentes ou des cloisonnements d'espace ; les traces de délimitations d'aires différentes sont également visibles…. La domestication complète du feu est avérée à cette période, entre -1 Ma et 400'000 ans, par la présence de véritable foyer construit, de combustibles et de résidus montrant des combustions à assez haute température. Elle est le fait de l'Homo erectus. Les emplacements de foyers, lorsque l'habitat est en grotte, se situent en extérieur ; pour l'habitat en plein-air, il est positionné de façon à permettre l'évacuation des fumées. La maîtrise du feu a été une étape décisive dans l'évolution des conditions de vie : lutte contre le froid, protection contre les animaux, cuisson des aliments - végétaux ou animaux -, fumage des viandes pour la conservation, durcissement des pointes d'épieu... . Exemples de sites du Paléolithique inférieur :
![]() Plus d'informations sur le ![]()
Plus d'informations :
//// L'habitat au Paléolithique moyen [- 300 000 - 35 000]À partir du Paléolithique moyen, les hommes, cueilleurs-chasseurs-pêcheurs, maintiennent un mode vie nomade. Ils se déplacent à l'intérieur de vastes régions et s'installent sur des territoires aux ressources suffisantes en eau, gibier, matières premières pour leurs outils, armes, objets. Aux Paléolithique moyen, comme dans la période précédente, les premières lignées d'Homos s'abritent dans l'entrée des grottes, en abris sous-roches ou dans des campements en plein-air. Les séjours sont de durées variables. Les campements s'établissent autour d'activités spécifiques :
Les sites sont, à la fin de leur utilisation, abandonnés dans l'état : éléments d'habitation, matériel, armes sont laissés sur place. Exemple de sites au Paléolithique moyen :
La grotte de Lazaret, près de Nice (Alpes-Maritimes), au pied du Mont Boron. Le site a été occupé entre - 230'000 et - 120'000 ans (Paléolithique moyen). Cet habitat a accueilli des Néandertaliens et a vu plusieurs générations de chasseurs Homo erectus. Les industries lithiques présentent sur place sont datées de l'Acheuléen utilisant, entre autre, la technique du débitage Levallois. Les matériaux utilisés sont d'origine proche : galets et aussi, plus lointaine : silex, jaspe, quartzite, rhyolite. Les occupations vont de quelques jours à plusieurs mois. Une supposition de "cabane" positionnée à l'intérieur de la grotte. Elle serait large de 3,5 mètres et longue de 11 mètres. Elle pouvait abriter une dizaine de personnes et serait datée de -150 000 ans BP. Cette cabane se repèrerait par une ceinture de pierres sèches. Le dispositif serait complété par des peaux. Cette hypothèse est contestée par d'autres études.
Le site d'Orangia 1 présente une série de sept petites cuvettes. Des pierres sèches forment une bordure orientée face au vent du Nord. On peut supposer une disposition de paravents pour compléter le dispositif de protection. Chaque cuvette mesure entre 2 et 3 mètres. Pas de datation connue.
//// Les habitats des Néandertaliens au Paléolithique moyen : [entre environ -300 000 à -28 000 ans]Les Néandertaliens ont vécu sur une très longue période, au moins 200 000 ans, durant le Paléolithique moyen et début du supérieur. Ils ont vécu en Europe, en Asie et au Proche-Orient. Ils ont connu des périodes climatiques froides et tempérées auxquelles ils ont dû s'adapter. Les hommes de Neandertal s''établissent sur des sites très variés - plaines, montagnes, fonds de vallée, îles... -. Le choix de l'implantation du site est fonction du potentiel du lieu en ressources, en protection, en ensoleillement…. La durée des séjours est variable : de peu de temps à de plus longue durée, parfois, dans certains lieux, des vestiges montrent plusieurs couches d'occupations successives, sur plusieurs générations. À partir de l'implantation d'un camp de base, les Néandertaliens rayonnent autour (de quelques dizaines de km à des centaines de km) pour implanter des bivouacs ponctuels. Ces camps intermédiaires sont choisis en fonction des saisons et des ressources qu'ils offrent : Les hommes sélectionnent leur gibier - cervidés, cheval, rennes, aurochs, bison, mammouth, rhinocéros laineux, ours… - pour la viande ou la fourrure. Ils repèrent des lieux de pêche ou des emplacements de récolte de fruits, de végétaux comestibles…. Ils recherchent des zones abondantes en matières premières. C'est le cas par exemple :
Les vestiges montrent une grande adaptabilité et ingéniosité des hommes de Néandertal dans la fabrication de leurs artefacts. Ses qualités se retrouvent dans la conception de leur habitat. Les dispositifs d'habitation et d'aménagement varient d'une région à l'autre et sont en fonction des matériaux trouvés :
![]() L'aménagement de l'espace :Pour la construction du foyer (élément central de l'habitation), des solutions ingénieuses ont été retrouvées par Neandertal : disposition de galets, aménagement de cuvette, des conduits d'aération (évents), murets entourant le foyer, coupole… Des aires d'activités sont délimitées par différents procédés : des sols dallés en pierres ou en galets, des espaces couverts ; ou encore repérées, comme des traces de litières végétales. L'habitat en ossement du Moustérien :L'hypothèse d'une forme de sédentarisation des Néandertaliens sur les campements de bases a été émise par les paléontologues. Elle s'appuie sur les moyens importants mis en œuvre (en temps, en énergie, en matière d'œuvre) pour la construction des habitats en ossements. Exemple :
Le site Molodova 1 est situé dans la vallée du Dniestr en Ukraine. Une étude récente montre que ce site est caractéristique d'un habitat néandertalien. Il est daté du Moustérien, de la période inter-pléniglaciaire : On y retrouve une riche industrie lithique de 40 000 artefacts de ce faciès. Construit dans un environnement de steppe sans forêt, la structure des cabanes est constituée d'os et défenses de mammouths. Ce type de construction a nécessité un abattage de plusieurs animaux ou la récupération de carcasses d'animaux morts naturellement, ainsi que leur transport.
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